Lundi 5 août 2024 à 17h30
Au cinéma l’Uxello à Vayrac (46)
Conférence de Marylène PATOU-MATHIS
Marylène Patou-Mathis est chercheure au CNRS spécialisée dans les faunes paléolithiques et dans la connaissance de l’Homme de Néandertal.
En 2006, M. Patou-Mathis publiait un livre : « Néanderthal – Une autre humanité ».
Titre délicat s’il en est.
Que faire de l’os d’ours brûlé de Bruniquel ? Quelle est sa place dans la relation des néandertaliens à l’animal ?
Quelles différences entre les néandertaliens et l’homme dit (anatomiquement) moderne
Les néandertaliens et le monde animal … quels néandertaliens ? Quels outils du savoir permettraient de présupposer une unité culturelle durant près de 300 000 ans et à 15 000 km de distance. Des similitudes d’outil
Trop écraser l’espace, et surtout le temps, ne met-il pas en cause la crédibilité de certains discours ?
Dans l’annonce de la conférence, il est écrit : « … Nous présenterons quelques exemples qui témoignent de l’existence de relations particulières avec certaines espèces.«
Nous sommes demandeurs de ces données. Même si elles sont puisées à plus de 10 000 km et à plus de 100 000 années d’écart.
M. Patou-Mathis dispose d’une connaissance encyclopédique de cette période de l’histoire humaine, qui lui permet
Y a-t-il des os d’animaux sur lesquels on ait su déceler des impacts d’armes qui ont blessé ou tué ?
Trouve-t-on de possibles offrandes dans des sépultures ?
Connait-on des os déposés dans des situations qui pourraient relever d’un culte ?
Quelles parures tirées du monde animal, dont les plumes d’oiseau ?
Y a-t-il des sélections dans les proies qui pourraient relever d’autre chose que d’une plus grande facilité de prédation ?
Y a-t-il des indices de recherche de bois de chute de cervidés ?
Qu’en est-il du charognage ?
Quelles relations avec les autres occupants de ces lieux d’activité que sont les cavernes ?
– Les ours : dispose-t-on de données argumentées de fuites ou de confrontations ?
– Acceptait-il la présence des rats, souris, et autres prédateurs de ses propres festins ?
– Et les chauves-souris ? Le monde néandertalien est à cheval sur l’Éémien (stade isotopique 5, ex interglaciaire Riss/Wurm). que cette période tempérée a dû très forte présence. Comment partagent-ils les mêmes lieux, les mêmes abris souterrains naturels ?
Qu’est-ce qui caractérise Néandertal dans sa relation au monde animal ?
Qu’est-ce qui le différencie de ses successeurs ? … Une sélection de proies différentes ? Une plus intense pratique du charognage ? … La place du bestiaire dans son imaginaire ?
Qu’est-ce qui le différencie de ses prédécesseurs ? … plus passionnant peut-être, plus inaccessible certainement.
« Humanité » – Les néandertaliens … humains ?
« Autre » – Pourquoi « autre » ?
Et puis une question latente, un peu plus philosophique :
Le cerveau de l’Homme de Néandertal était différent du notre. Toutes les ostéométries de la boîte crânienne l’indiquent. Alors comment percevait-il le monde … restreignons-nous en l’occurrence au monde animal ?
-le cerveau des Néandertaliens étant très différent du nôtre, il avait certainement des capacités cognitives et des sens différents des Sapiens, plus aiguisés? plus proches de la nature, donc du monde animal? Donc des relations avec ce monde très certainement différentes de celles des Sapiens (j’entends ceux du Paléolithique, pas nous qui avons perdu pratiquement tout contact avec la nature, mais aussi avec les animaux en-dehors de nos chats, poissons rouges et viande dans notre assiette)
-si l’on suggère que Sapiens a exorcisé le sacrifice animal par ses représentations graphiques, Néandertal a sans doute, du fait de sa possible proximité avec le monde animal, été confronté à ce problème, mais nous ne saurons sans doute jamais comment il l’a résolu…
Néandertalien européen vu depuis les Amériques. En tout état de cause, il est au moins aussi crédible que celui de nos visions européanocentrées qui restent dominantes. mieux que les images fades, déshumanisées, centrées sur l’illusion que plus petit dénominateur commun
Et le lien avec le monde animal : les plumes. La parure est là. Le totémisme n’est pas loin …
…Mais a-t’on les éléments pour en parler de ces comportements ? Difficile, même si la génétique nous apporte un jour des informations sur les zones du cerveau néandertalien et leurs fonctions, il nous manquera toujours la connaissance des connexions mises en place, ainsi que leur évolution, sur 400 000 ans (je trouve que les scientifiques ont trop tendance à « écraser » la dimension temporelle -les mentalités du début du christianisme, par exemple, étaient très différentes de celles du XIXè siècle, et il n’y a que 2000 ans-), et cela sur des territoires allant de la Sibérie à l’Europe occidentale
Donc, j’espère que qu’elle ne développera pas des spéculations intellectuelles, passionnantes, sans doute brillantes, mais improuvables scientifiquement.
Mais, si elle avance des idées pertinentes, pourquoi se priver de ce plaisir intellectuel ?
-donc, j’attends plutôt des informations sur les points suivants :
*les espèces animales qu’il a fréquentées pendant 400 000 ans et sur toute l’Eurasie
*les animaux chassés pour l’alimentation, ou la survie (animaux dangereux non consommés)
*le matériel lithique associé à la chasse et au traitement des cadavres pour l’alimentation, la confection de vêtements, etc.
*la parure tirée du monde animal
L’association « Préhistoire du Sud-Ouest » est entièrement indépendante de la Mairie de Cabrerets. Nous remercions la commune, ses élus, et la direction du centre du Pech Merle de leur soutien sans faille.